Femmes, je vous aime

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Alain a écrit un Propos, intitulé "L’odeur du réfectoire", qui est la clé avec laquelle on ouvre toutes mes serrures… J’ai été pendant quatre ans pensionnaire dans un orphelinat de prêtres salésiens dont quelques uns étaient pédophiles. Ne pas avoir été leur victime n’empêche que, pendant toutes ces années où l’on craint de l’être, un tempérament libertaire se constitue dans ce qui était, au beau milieu de la campagne, la vie dans une prison à ciel ouvert.

J’ai vécu entre l’âge de dix à quatorze ans rien qu’avec des garçons ou des hommes adultes, sauf quelques rares exceptions de femmes professeurs laïques qui arrivaient le matin et repartaient en fin d’après midi sans qu’elles puissent jamais constater que nous vivions dans un enfer. Mon quotidien était fait de ces hommes ayant fait vœu de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. Par nécessité, ils étaient pauvres; par manque d’occasions certains étaient chastes, mais pas tous; par impossibilité de trouver des occasions de désobéissance, ils obéissaient.

Pendant toutes ces années j’ai appris olfactivement le monde: la puanteur d’un curé qui vendait des bonbons d’une main tout en remettant ses chaussettes avec son autre main pleine de doigts aux ongles noirs, le bon père Magueure; les mauvaises odeurs d’un autre qui ignorait l’existence du savon; l’effluve sucré d’un troisième qui se parfumait avec ce que l’on dirait aujourd’hui être un parfum d’adolescent; la mauvaise haleine d’un quatrième qui enseignait le travail manuel et en profitait pour envelopper le corps des petits garçons que nous étions pour leur apprendre le bon geste avec la scie ou la gouge; l’odeur d’homme pas fini du père infirmier qui commençait par faire baisser le pantalon de quiconque avait mal à la tête ou s’était coupé le doigt, le bon père Robineau. Je ne connais que trop l’odeur des hommes....

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