Les Invalides
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Je venais de publier mon livre sur Albert Camus, L’Ordre libertaire –c’était donc en 2012. Le secrétariat du patron du Nouvel Observateur m’avait contacté: "Monsieur Jean Daniel souhaite vous rencontrer. A quelle date pourriez-vous venir le voir à Paris?" Nous sommes convenus d’une date et d’une heure pour un rendez-vous dans son bureau.
Voici ce qui s’y est dit :
Jean Daniel: Vous savez que j’ai été l’ami d’Albert Camus, que je l’ai donc très bien connu…
Moi: Oui, je sais, j’ai lu les biographies qui lui ont été consacrées et je ne l’ignore pas… Et puis j’ai vu votre film sur lui.
Lui: Alors pourquoi n’avez vous pas parlé de moi dans ce livre?
Moi: Parce que c’était un livre sur Camus, pas sur vous…
Lui: J’aurais pu vous apporter mon témoignage, vous apprendre des choses…
Moi: Je n’en doute pas, mais je ne crois qu’à la lecture croisée des œuvres complètes, des biographies et des correspondances générales. C’est ma méthode. D’ailleurs, vous n’avez jamais publié votre correspondance avec Camus, je crois?
Lui: …
Moi: Vous avez d’ailleurs raconté ce qu’ont été vos relations avec lui dans un certain nombre de vos livres que j’ai lus…
Lui: Oui, mais je suis sûr qu’une conversation avec moi vous aurait été utile
Moi (me répétant): Probablement, mais c’était un livre sur lui, pas sur vous…
Lui : Il n’empêche…
Moi (souriant): Mais je vous promets que quand j’écrirai un livre sur vous, je ne parlerai pas de lui…
L’entretien n’a pas duré bien longtemps, on s’en doute. Une fois rentré chez moi j’ai vérifié dans mon livre: Jean Daniel y était cité à deux reprises, dont une fois pour un confidence qu’il me fit un autre jour, je ne l’ai vu que deux fois, c’était donc la première, sur le rapport de Camus à Proudhon –ce qui, pour...