DÉFAITES DE NOËL

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Je songe aux veufs et aux veuves qui, en famille, ou ce qu’il en reste après décompositions et recompositions, sourient et donnent le change, ont acheté des cadeaux, en offrent et en reçoivent, boivent du champagne et dévorent de la bûche, avalent de la dinde au marron et se gavent de foie gras, mais passeront la soirée, au milieu du bruit, en présence de l’absent qui, plus que tout autre présent ce soir-là, sera le présent essentiel: la mort c’est la présence douloureuse et lancinante de l’absent.

Je songe aux parents qui ont perdu leur enfant, quel que soit l’âge: un cancer, un accident de voiture ou de moto, un suicide, un arrêt cardiaque, un AVC fatal, une rupture d’anévrisme. Il y aura des cris de joie d’enfants ou de petits enfants, mais là aussi, là encore, on songera au dernier Noël avec celle ou celui qui n’est plus là et dont le visage pris par la mort ne cessera de hanter la soirée du parent affligé par un douleur telle qu’aucun nom n’existe pour la nommer – on dit veuve ou veuf pour qui perd sa femme ou son mari, orphelin pour qui perd ses parents, mais rien pour la souffrance d’un parent privé de son enfant : perdre un enfant c’est se perdre sans retour.

Je songe à ceux qui ont perdu un père, une mère, un grand-père, une grand-mère et qui, années après années, voient les rangs de la table familiale s’éclaircir parce que les anciens laissent des places vides. Les grands-pères hélas devenus papys, les grands-mères devenus hélas mamies, quand ce ne sont pas des sobriquets tous plus ridicules les uns que les autres, du genre maloum ou papoum, qu’on a vus se fatiguer, vieillir, s’effondrer, puis partir, seront là quand on regardera furtivement la place qu’ils...

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