Gauche d'en haut, gauche d'en bas
Conversation récente avec des amis qui s’étonnaient que, libertaire, je puisse défendre la police, l’armée, les services secrets, ceux du renseignement… J’ai toujours peine à constater que la gauche est irénique, croit à la bonté naturelle des hommes, alors que tout contribue à nous prouver le contraire depuis des millénaires. Si les hommes étaient des anges, si même on pouvait en faire des anges, nous n’aurions pas besoin de ce qui interdit l’empire du diable ! J’aimerais que nous n’ayons pas besoin des pompes funèbres, mais la mort existe ; j’aimerais que nous n’ayons pas besoin de vidangeurs, mais les excréments existent ; j’aimerais que nous n’ayons pas besoin d’éboueurs, mais les ordures existent.
Le monde n’est pas un jardin des délices, un bonheur parfumé, un éden enchanté. Sans ceux qui font ces métiers, nous étoufferions sous des monceaux de cadavres en putréfaction, nous nagerions dans des flots de matières fécales, nous croulerions sous des tonnes d’immondices. Remercions-les de faire ce que nous ne ferions pas. Ces fameux amis de gauche (gauche d’en haut, gauche transcendantale, gauche aux mains pures qui n’a pas de mains…) n’aiment pas la police, mais quand on cambriole leur résidence secondaire, ils vont porter plainte au commissariat ; ils fustigent l’armée, mais (au contraire de moi qui en fait une force républicaine d’opposition à une éventuelle menace sur l’intégrité du territoire, pas plus…), ils applaudissent ses interventions « humanitaires » décidées par les présidents socialistes ; ils n’ont pas de mots assez durs contre les services secrets ou les renseignements généraux, mais ils ne cachent pas leur satisfaction qu’un réseau dormant de terroristes ait été démantelé dans le pavillon à côté du leur… Alors ? Quand l’idéologie infantile laissera-t-elle place à une pensée pragmatique, concrète, qui définirait une gauche libertaire (gauche d’en bas, gauche immanente, gauche aux mains qui...